
Pierre Lavoie
Pierre Lavoie est chercheur postdoctoral en études américaines à l’Université Yale (FRQSC). Il a consacré une thèse de doctorat et plusieurs articles scientifiques à l’histoire des pratiques culturelles transfrontalières partagée entre le Québec et la Nouvelle-Angleterre au début du 20e siècle. Il participe fréquemment à la discussion publique sur la patrimonialisation culturelle (Télé-Québec, Le Devoir) et on peut l’entendre régulièrement à l’émission Aujourd’hui l’histoire (Ici Radio-Canada Première).
Communication : « « The Inaliebale Right to Existence » : Corinne Rocheleau-Rouleau, à l’intersection linguistique de l’instruction des personnes sourdes et de l’histoire des francophones d’Amérique ». Voir la pragrammation
Résumé : La trajectoire de Corinne Rocheleau-Rouleau (1881-1963) est à la fois exemplaire et singulière dans l’histoire intellectuelle de l’espace transnational francophone du Nord-Est américain hérité des grandes migrations ouvrières canadiennes-françaises vers les États-Unis de la fin du 19e siècle. Elle grandit, étudie et travaille successivement à Worcester, Montréal et Washington, DC, ce qui fait d’elle une observatrice privilégiée et une participante des institutions nationales canadiennes-françaises, franco-américaines et états-uniennes de la première moitié du 20e siècle, une période faste de la reconfiguration des identifications nationales de part et d’autre de la frontière. Or, en plus d’être partagée entre des communautés linguistiques francophones et anglophones, Rocheleau-Rouleau s’avère une figure importante de la recherche sur la condition sociale et l’instruction des personnes sourdes et malentendantes.
Elle-même atteinte de surdité en bas âge, elle demeure en contacte tout au long de sa vie avec certaines institutions montréalaises, comme l’Institution catholique des sourdes-muettes dirigée par les Sœurs de la Providence ; tout en participant à la discussion publique sur le sujet aux États-Unis (Those in the Dark Silence: The Deaf-Blind in North America, 1930). Son implication sociale et intellectuelle adopte par ailleurs la forme transnationale de son parcours personnel et identitaire. Son intérêt pour la langue, la communication, l’identité et le droit inaliénable à l’existence ; et son expérience transnationale se transposent en effet dans ses écrits sur l’histoire des francophones d’Amérique, alors qu’elle s’intéresse à des sujets tirés autant de l’histoire coloniale des Caraïbes (« La feuille de route d’un galonné français, Guadeloupe, États-Unis, Canada [1776-1784] ». Revue d’histoire de l’Amérique française, 3 [1], 81–93) qu’à celle de l’expérience identitaire canadienne-française (Laurentian Heritage, 1948).